Paul Loubeyre, lauréat du prix Emilie du Châtelet 2020 de la SFP

Paul Loubeyre (CEA-DAM) est spécialiste mondial de la physique des hautes pressions, s’est attaqué dès le début de sa carrière au problème fondamental de la métallisation de l’hydrogène sous hautes pressions.

En 2002, il observe la fermeture dans le visible du gap électronique de l’hydrogène solide à 320 GPa permettant de prédire que la réalisation de l’état métallique pourra être atteinte vers 450 GPa, métallisation prédite en 1935 par Wigner et al. L’hydrogène métallique est un matériau quantique remarquable. Comprendre ses propriétés  est aussi important pour la modélisation des intérieurs  des planètes comme Uranus et Neptune. Paul Loubeyre et son équipe, très en pointe dans un domaine à l’évidence très compétitif, ont accumulé des percées remarquées :

- Pour montrer la fermeture du gap électronique jusqu’à la formation de l’hydrogène métallique, un banc d’absorption IR spécifique a été construit sur la ligne SMIS du synchrotron SOLEIL.  La transition métallique de l’hydrogène solide a ainsi pu être observée à 425 GPa. Cette avancée majeure va permettre de révéler toutes les propriétés de ce matériau unique, qui ne contient qu’un seul électron par atome : passage de la phase moléculaire à la phase atomique, supraconductivité, développements théoriques,…

 

- Parce que les enclumes en diamant classique ne résistent pas à des pressions supérieures à 400 GPa, P. Loubeyre a conçu et réalisé une nouvelle forme (toroïdale) pour les enclumes qui leur permettent d’atteindre 600 GPa.

- Pour étendre la mesure de l’équation d’état de l’hydrogène dans le domaine du plasma dense et couvrir un large domaine en densité et température, Paul Loubeyre a démontré avec des collègues d’outre-Atlantique (Berkeley, Rochester, Livermore) le couplage du statique et du dynamique en générant une onde de choc dans une cellule à enclumes diamant. Ce nouveau concept de cibles pré-comprimées permet de faire varier la densité initiale et de mesurer les propriétés de l’hydrogène  dense et tiède dans les conditions de l’intérieur profond de Jupiter.

 

Un autre axe de recherche de P. Loubeyre est l’étude du fer sous très haute pression. Ce domaine, à cause de son importance géophysique, a été un système phare pour développer des approches pour l’étude des métaux sur les lignes de lumière de l’ESRF.

La technique de chauffage laser résolu en temps avec observation structurale de la fusion a permis de résoudre une longue controverse sur la détermination de la courbe de fusion du fer et d’obtenir un résultat important pour la géophysique. Ces approches ont aussi permis d’obtenir un large corpus de données sur les métaux qui a servi à tester les fonctionnelles des calculs ab-initio. Les mesures d’absorption X sur le fer « choqué » par laser, obtenues à l’aide d’un seul pulse X du synchrotron, ont montré que l’on pouvait étudier simultanément la structure locale et électronique de la matière dense et chaude.

En étudiant les mélanges hydrogène-Fer, Paul Loubeyre et ses collaborateurs ont synthétisé  le premier super-hydrure, FeH5.

Grâce à sa rigueur, son ingéniosité et un talent remarquable pour une recherche profonde et patiente, Paul Loubeyre a une production scientifique qui fait référence dans la communauté internationale. C’est de plus un excellent formateur : 4 de ses 14 doctorants ont été récompensés par des prix américains et français. Son audience internationale a également été saluée par l’attribution du « Bridgman Award » en 2015.

 

Composition du jury : 

  • François-Marie Bréon, directeur adjoint au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement, CEA/CNRS/Université Paris-Saclay
  • Gilles Chabrier,  directeur de recherches au CNRS, CRAL ENS Lyon - lauréat du Prix Jean Ricard 2010
  • Danièle Dowek, directrice de recherches à l'Institut des Sciences Moléculaires d'Orsay, Université Paris-Sud/CNRS - lauréate du prix Félix Robin 2017
  • Yannis Karyotakis, directeur de recherches au LAPP, CNRS/Université Savoie Mont-Blanc
  • Henri Mariette, directeur de recherches CNRS Institut Néel
  • Bart Van Tiggelen, président de la Commission Publications scientifiques et science ouverte de la SFP
  • Minh Quang Tran, Président de la Société Suisse de Physique (SPS)
  • Catherine Langlais , présidente de la SFP, présidente du jury
  • Guy Wormser, vice-président SFP
  • Alain Fontaine, secrétaire délégué aux Grands prix de la SFP

 

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