Possible observation du fermion de Majorana dans un dispositif solide

Découverte scientifique

Pendant le March Meeting de la APS, fin février 2012 à Boston, Leo Kouwenhoven a annoncé que son groupe à l'Université de Delft (Pays-Bas) avait observé des fermions de Majorana pour la première fois.

Les « Majoranas » sont des particules identiques à leur antiparticule. A ce jour, aucune particule fondamentale n'est connue pour être un Majorana (la question reste débattue pour les neutrinos). Les Majoranas pourraient cependant apparaître comme quasi-particules émergentes dans différents systèmes de la matière condensée. Ainsi, les quasi-particules d'énergie nulle dans un supraconducteur sont des Majoranas. Le groupe de Delft a mesuré le courant tunnel entre un métal et un nanofil d'antimoine d'indium (InSb) en contact avec un supraconducteur conventionnel.

Dans cette expérience, un Majorana se manifeste par une anomalie à tension de polarisation nulle. Cette anomalie n'apparaît qu'en présence d'un champ magnétique assez fort. Elle est la signature d'un état lié en dessous du gap supraconducteur et qui reste topologiquement piégé à énergie nulle dans une certaine gamme de champ. Dans les systèmes électroniques, les Majoranas apparaissent par paire de façon à réaliser un fermion de Dirac. Ils sont, en quelque sorte, les parties réelle et imaginaire d'un fermion complexe. Une part de l'intérêt porté à ces Majoranas est qu'ils peuvent être localisés très loin l'un de l'autre. Ils se situeraient par exemple aux deux extrémités du nanofil d'InSb dans l'expérience de Delft. Ils seraient donc insensibles à des perturbations électriques locales. On pourrait alors former un bit quantique topologiquement protégé de la décohérence selon que l'état fermionique forme avec cette paire de Majoranas est vide ou occupé. L'observation du groupe de Delft est une étape importante pour ce nouveau champ de recherche.

 

Référence: Eugenie Samuel Reich, Nature 483, 132 (08 Mars 2012)

Voir l'article original (en anglais): Observation of electron-antineutrino disappearance at Daya Bay

Partager cet article